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La joie de la vaisselle

Vreugde Aan De Afwas

Une chose m’a surprise lorsque j’ai fait mes premiers pas dans un temple zen : la joie que j’ai ressentie en faisant la vaisselle. Bien sûr, ce n’était pas tous les jours la fête devant l’évier, mais quelque chose a fait que la vision que j’avais de cette activité banale a radicalement changé. Pour beaucoup de gens, plonger chaque jour ses mains dans l’eau mousseuse de la vaisselle est une corvée fastidieuse. Peut-être est-ce lié au moment de la journée, après le repas, alors qu’on a seulement envie de profiter d’une tasse de thé ou de café et d’une petite douceur pour l’accompagner. Preuve de cette aversion : le lave-vaisselle qui s’est imposé dans presque tous les foyers et qui – supposément – nous permettrait de regagner un peu de liberté. Ce n’est pas la bonne façon de voir les choses !

La vaisselle est l’une des activités les moins valorisées de la vie quotidienne. Ce n’est pas un acte grandiose, il est aussi quotidien et banal que se brosser les dents, arroser ses plantes, faire ses lacets, nettoyer ses lunettes, etc. Pour moi, c’est un rituel qui a naturellement trouvé sa place dans ma vie. La vaisselle, tout le monde l’a déjà faite, ou presque… en tout cas, tout le monde a regardé quelqu’un la faire ;-).

La vaisselle est un rituel qui s’honore de l’attention noble que lui porte la personne qui la fait. Plusieurs choses rentrent en jeu quand on fait la vaisselle : l’attention, l’écologie, le rythme, la sollicitude, l’efficacité, l’amour… bref, tous les aspects de la vie. Ce n’est pas l’assiette, le verre ou la casserole sales qui en font une activité « inférieure » ou « ennuyeuse ». Non, c’est le regard que nous portons sur elle. La solution est cachée quelque part dans notre propre esprit, il suffit de la chercher.

Nous parlons tellement du « ici et maintenant » et de « l’attention » que cela nous sort parfois par les oreilles, mais la personne qui fait la vaisselle doit avant tout être concentrée pour pouvoir accomplir sa tâche correctement.  Tout d’abord, elle doit faire attention aux nombreuses choses fragiles qui passent entre ses mains. Les verres, par exemple, nécessitent une manipulation délicate. Les tasses à thé japonaises doivent également être placées avec précaution dans l’eau. Même une assiette peut rapidement se retrouver brisée en morceaux sur le sol à la suite d’un mouvement incontrôlé. Il faut faire attention aux couteaux que l’on met à part et qu’il faut manipuler avec prudence. Et comment récurer les casseroles sans les rayer ? Et que faire des restes ?

Il y a un ordre à respecter lorsqu’on plonge les couverts dans le bac à vaisselle, du moins sale au plus sale. L’eau ne doit être ni trop chaude ni trop froide. L’éponge et le produit vaisselle sont de préférence écologiques, il faut utiliser la bonne quantité d’eau. Les ustensiles pour la vaisselle doivent être utilisés de manière hygiénique pour éviter la prolifération des bactéries.

Le choix d’une éponge à vaisselle compte aussi : souple ou ferme, sobre ou colorée. Les petites choses de la vie quotidienne nous font du bien lorsque tout ne va pas pour le mieux. Par une journée grise et morne, le jaune canari ou le vert vif de l’éponge peut être le petit remontant qui nous ramène à la joie du « moment présent ».

« L’idée que la vaisselle est désagréable, à mon avis, ne peut naître que si l’on ne fait pas vraiment la vaisselle. Une fois devant l’évier, les manches retroussées et les mains plongées dans l’eau chaude, c’est vraiment très agréable. J’aime prendre mon temps et être pleinement conscient de l’eau et de chaque mouvement de mes mains à chaque fois que je fais la vaisselle. Je sais que si je me dépêchais pour passer plus vite au dessert, le temps passé à faire la vaisselle deviendrait désagréable et ne vaudrait pas la peine d’être vécu. Ce serait dommage, car chaque minute, chaque seconde de la vie est un miracle. La vaisselle elle-même et le fait que je la fasse ici sont des miracles ! »
Thich Nhat Hanh

Annemie Genshin Van Attenhoven

Traduction vers le Français: Dimitri Mouton

"Zazen, c’est aller là où on ne peut pas aller, sans doute, sans crainte avec le cœur ouvert". Reigen Wang-Genh

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