Danser avec toutes choses
Bien que la méditation zen (zazen) soit relativement immobile, je ne peux me débarrasser de l’impression que cette pratique nous invite finalement à une sorte de « danse ».
Maître Kodo Sawaki aimait utiliser la phrase : « le zen signifie : savoir bouger son corps ». Le saut vers la danse est alors relativement vite franchi.
Pour moi, danser signifie alors : comment gérer les phénomènes externes et internes de notre vie ? Comment être complètement dans le moment présent ? Comment s’ouvrir à la nouveauté, à la spontanéité, à l’imprévu ? Comment relativiser, voire abandonner les opinions et les points de vue égocentriques ? Comment faire la bonne pirouette à l’extrémité de cet instant ?
Échouer
Samuel Beckett a écrit dans l’une de ses dernières œuvres : “Déjà essayé. Déjà échoué. Peu importe. Essaie encore. Échoue encore. Échoue mieux.” (voir : Worstward Ho ! – version anglaise)
Échouer aussi est une danse.
Ce mouvement, cependant, n’est pas une « chute ». Nommer les choses est toujours une question de point de vue et de contexte.
Comment transformer l’échec, la « chute », en danse ?
Regardons le cosmos. Ici, le point de vue ne veut pas dire grand chose. Échouer – chuter n’a aucun sens ici. Dans quelle direction le mouvement de chute devrait-il s’effectuer ? Tous les points de vue, toutes les directions sont également « bons » – et alors que signifie « bon » ? Dans le cosmos, ne créons pas de distinctions.
Regardons encore une fois une image du télescope James Webb. Nous ne voyons qu’une infime partie de la danse cosmique de milliards de galaxies. C’est presque impossible à comprendre… Qu’est-ce que cette image nous apprend en réalité ?
Toucher
Revenir du cosmos à la vie quotidienne est un véritable défi. C’est précisément là que réside la pratique spirituelle. Comment traduire les connaissances acquises en zazen dans nos activités quotidiennes ? Comment pouvons-nous « danser » dans la vie ?
Exactement en ne lâchant pas le cosmos !
Dans ses enseignements oraux sur le Shin Jin Mei, Maître Deshimaru dit, entre autres, ce qui suit :
“En une pensée, nous devons voir le cosmos tout entier. En une seule respiration, nous devons sentir le cosmos tout entier. En une seule écoute, nous devons entendre le cosmos tout entier. En un seul goût, nous devons goûter le cosmos tout entier. Par notre seul corps, nous touchons le cosmos tout entier. (…) Par un seul moment de conscience, zazen englobe tout le cosmos. Zazen, c’est entendre tout le cosmos à travers une seule oreille. Zazen, c’est sentir, respirer le cosmos par une seule narine. Zazen, c’est toucher tout le cosmos par notre seul corps.” (Shin Jin Mei II, p.140, 145)
Toucher c’est danser avec toutes choses.